Tant que l’on nous demandera de faire toujours plus avec toujours moins, nous serons au combat pour défendre la République des territoires. Face à l’obscurantisme d’où qu’il vienne, notre collectivité ne peut rester muette. Elle est une conscience, elle est une voix. Dans un pays traversé par la défiance, les fractures, les tensions, nous avons une responsabilité immense : faire tenir nos territoires, accompagner celles et ceux qui s’engagent, offrir des chemins d’émancipation, protéger les plus fragiles, assurer l’égalité. Le département de Meurthe-et-Moselle continuera à être au rendez-vous.
Ce qui fonde, profondément notre action publique et la République, ce sont les forces d’émancipation et de cohésion qui font tenir nos territoires. Je pense à tous celles et ceux qui préparent, à quelques mois des municipales, une nouvelle page démocratique. Préparer une liste, bâtir un projet de territoire, rassembler des énergies, ce n’est jamais simple. C’est un exercice exigeant, souvent ingrat, mais essentiel à la vitalité républicaine. Leur engagement, patient et déterminé, mérite toute notre reconnaissance.
Pour mener à bien leur projet, les élus sont accompagné d’agents publics, fonctionnaires ou contractuels. Elles et ils sont les visages du service public de proximité. Malheureusement, ils sont exposés à un accroissement des incivilités et de la violence dans l’exercice de leur fonction.
Cet archipel de solidarité, de citoyenneté et d’initiative irrigue chaque commune, chaque quartier, chaque village de Meurthe-et-Moselle. Les associations ne sont pas un secteur parmi d’autres : elles sont des lieux où l’on se rencontre, où l’on s’élève, où l’on invente. Elles nourrissent nos projets et politiques publiques. Elles sont nos partenaires incontournables et font vivre au quotidien la promesse républicaine. Leur engagement, porté par des bénévoles et des professionnels, constitue l’une des plus belles richesses de notre territoire. Pourtant cette vitalité associative s’essouffle, elle est fragilisée, en danger. Les associations nous le disent : “ça ne tient plus !”. La demande sociale explose, les financements s’érodent, les trésoreries se tendent. Au niveau national, près d’une association employeuse sur trois dispose de moins de trois mois de trésorerie ! Les baisses de financements s’ajoutent aux retards de paiement, les recrutements se figent, les activités se réduisent.
Et ce qui vacille alors, ce ne sont pas uniquement les structures : ce sont des pans entiers de vie sociale, éducative, culturelle et sportive ; ce sont des familles ne bénéficiant plus de soutien ; ce sont des jeunes sans repères ou sans lieux pour se construire ; ce sont des personnes isolées, précarisées, oubliées.
« Cette fragilité intervient alors même que les finances publiques nationales ont été engagées dans une impasse que chacun peut constater : le pays peine à adopter son budget, les trajectoires demeurent incertaines, et les collectivités subissent les contrecoups d’une politique fiscale qui a asséché les marges de manœuvre et creuse les inégalités. L’Etat s’est depuis 2017, par idéologie, privé de recettes mettant à mal notre modèle de solidarité et les valeurs qui fondent notre République. Une politique de l’offre, du ruissellement, qui a profité aux plus riches. Face au déficit abyssal qu’il a lui-même creusé, l’Etat refuse la taxation de 2% sur le patrimoine des très grandes fortunes (à partir de 100 M€ par an) proposée par l’économiste Gabriel Zucman. Proposition ayant pour objectif de rétablir un principe d’égalité devant l’impôt là où l’optimisation fiscale permet aux ultra-riches d’échapper pour partie à l’impôt. Pourtant, c’est à nouveau les plus modestes, les classes moyennes qui sont appelés par le gouvernement à faire des efforts inacceptables. Ainsi, le projet de loi de finances pour 2026 prévoyait une “année blanche” avec le gel des prestations sociales, des pensions, des barèmes — le doublement des franchises médicales - la limitation des arrêts de travail… Bref, le musée des horreurs. Ce même projet de loi de finances annonce de nouvelles coupes dans les crédits dédiés à la vie associative, au sport, à l’économie sociale et solidaire ».
Les Assises des Départements de France viennent de se tenir à Albi redonner de l’air, enfin, à l’échelon départemental. Un constat est désormais partagé, confirmé par la Cour des Comptes : celui d’une aggravation des difficultés financières des départements. Ils sont aujourd’hui une soixantaine sur les cent quatre à connaître une situation budgétaire préoccupante. Je salue la volonté de dialogue du premier ministre. Oui un travail doit être engagé afin de sécuriser le financement de nos politiques de solidarité. Mais je me dois de poser un certain nombre de principes.
Tout d’abord, arrêter de stigmatiser les plus pauvres, les plus précaires rendus responsables de leur situation et des maux de la société.
Notre modèle social est en fragilité, non pas parce qu’il est généreux mais parce qu’il n’arrive plus à répondre aux besoins de plus en plus grands : accompagnement des personnes âgées, des personnes en situation de handicap, des enfants de l’aide sociale à l’enfance, accès aux soins, … Des dépenses qui ne cessent d’augmenter.
Il n’y a pas de décentralisation sans libre administration et il n’y a pas de libre administration sans autonomie financière.
Tant que ces principes ne seront pas respectés, tant que les départements resteront dépendants des fluctuations des marchés, des décisions unilatérales de l’État et de ses arbitrages budgétaires, tant que l’on nous demandera de faire toujours plus avec toujours moins, nous serons au combat pour défendre la République des territoires.
Et c’est précisément parce que l’incertitude demeure au niveau national que, localement, nous avons choisi de donner, tant que nous le pouvons, de la stabilité à celles et ceux qui agissent.
Enfin, cette session sera l’occasion de voter la seconde décision modificative du Budget 2025. Il ne s’agit pas d’un simple ajustement comptable. Elle démontre que, contrairement à l’État, nous maîtrisons nos trajectoires financières sans renoncer à nos priorités sociales, éducatives, territoriales. Ainsi, nous continuons à être aux côtés des personnes âgées hébergées en Ehpad et de plus en plus précarisées, en renforçant l’enveloppe de l’aide sociale à l’hébergement de 5,6 millions de d’euros. Dans un contexte budgétaire contraint, nous continuons à être aux côtés des territoires. Le CAUE, association d’ingénierie publique, accompagne les communes, les intercommunalités, les projets de revitalisation, de sobriété foncière, de transition écologique. Partout en France, les CAUE sont en danger de disparition du fait de l’effondrement de la taxe d’aménagement sous l’effet d’une réforme nationale ayant entrainé des défaillances graves dans la collecte de la taxe d’aménagement.
Il devient urgent de replacer la lutte contre le dérèglement climatique, la transition écologique au cœur de nos politiques nationales. Il devient urgent de cesser d’opposer la transition écologique et le social. De rappeler que les conséquences du dérèglement climatique touchent d’abord les plus vulnérables (je pense aux personnes âgées, aux enfants), les classes moyennes, les plus précaires, les pays les plus pauvres.
Favoriser les conditions de réussite pour nos 33000 collégiennes et collégiens, c’est offrir un lieu de citoyenneté, de culture, de sport, d’éducation populaire. Un lieu où les associations interviennent, où sont accueillies les résidences d’artistes, où des professionnels de l’éducation et du social croisent leurs regards. Cette ambition éducative se renforce aujourd’hui avec une nouvelle étape : la Programmation Pluriannuelle d’Investissement “Climat–Collèges 54”. Avec près de 20 M€ de travaux programmés entre 2026 et 2030, il s’agit de répondre aux défis très concrets du confort d’été, de la performance énergétique, de la désimperméabilisation et de la végétalisation des cours.
Le rapport issu de la mission d’information sur les aidants sera restitué durant cette session. Les travaux menés sur une proposition du groupe UDC que j’ai acceptée, ont confirmé à la fois l’ampleur du défi et la solidité des politiques déjà engagées par notre Département. Je remercie sincèrement l’ensemble des membres de cette mission pour leur engagement. Les aidants sont l’exemple même de ces forces silencieuses qui permettent au pays de tenir. Ils sont des conjoints, des parents, des enfants, des voisins. Ils portent, souvent seuls, la charge de l’autonomie d’un proche. Quelque fois jusqu’à l’épuisement.
En reconnaissant leur rôle, nous affirmons que la solidarité ne peut pas reposer uniquement sur les familles. Qu’elle doit être partagée, soutenue, accompagnée.
Le plaidoyer pour une nouvelle étape de la coopération franco-luxembourgeoise le rappelle avec force : nos territoires du Nord évoluent dans un déséquilibre structurel qui impacte le logement, les mobilités, l’emploi local, les services publics… Faute de financement, les communes et intercommunalités ne sont pas en capacité de répondre à ses nouveaux besoins et à un nécessaire aménagement du territoire adapté. En défendant un développement transfrontalier financé de façon plus juste, nous défendons la qualité de vie de nos habitantes et habitants, et les conditions même dans lesquelles les associations, les acteurs éducatifs, les services publics peuvent continuer d’agir. De part et d’autre de la frontière.