Pablo FLYE : « La participation citoyenne est au cœur de la réussite et de l’appropriation des idées »

Quel est votre rapport au territoire et à notre environnement meurthe-et-mosellan ?

J’ai grandi à Pont-à-Mousson, dans un environnement industriel. Ce territoire porte une réalité et un poids du passé post-industriel, ainsi qu’une pression économique qui ne permettent pas de le caractériser comme un territoire écologique. La population n’est pas naturellement portée vers les questions environnementales.  C’est un fait et une réalité ! Grandir dans un tel territoire post-industriel quand on s‘intéresse aux questions d’écologie est donc un vrai défi.

Avez-vous un « coin de nature » en particulier en Meurthe-et-Moselle ?

Mars-le-Tour, un village qui fait partie de mon enfance et qui me manque. J’aime aussi emprunter la voie verte de la Moselle à vélo.

Votre engagement puise sa source dans une histoire de famille…

En effet. Issu d’une famille avec des valeurs fortes, qui se partagent au quotidien, il m’a semblé naturel de poursuivre cet engagement pour les défendre et porter à mon tour ma contribution à la vie démocratique. L’Assemblée départementale des collégiens (ADC) a été le cadre de mes premiers engagements, j’étais déjà acteur de la vie de mon établissement scolaire avant de devenir activiste. J’étais élu collégien et je me souviens parfaitement avoir travaillé pendant deux ans sur la thématique des « valeurs de la République » et d’avoir participer à une clôture de session du Conseil départemental de Meurthe-et-Moselle.

À 15 ans, vous devenez le porte-parole de Fridays for Future France, parlez-nous de cette expérience ?

Les mouvements Youth for climate et Fridays for future ont été d’une richesse extrême, en offrant une voix aux plus jeunes et donc au premier public concerné par ce futur et la crise écologique. Dans cet élan général, j’ai voulu contribuer à faire changer les choses et à faire bouger les gens, d’abord près de chez moi, puis rapidement au niveau national.

Naturellement, il a fallu répondre aux besoins de représentants pour tous ces jeunes concernés par les enjeux et ainsi porter leur voix sur un plan médiatique. J’ai accepté cette place car je sentais que je représentais quelque chose de puissant à réaliser et avec du fond, du concret.

La rencontre avec le député Pierre Larouturou a représenté une opportunité de collaborer et de porter notre réalité au sein des institutions, autour d’un texte législatif fort. De manière opérationnelle, les citoyen·ne·s ont mobilisé ce pouvoir d’influencer le Parlement européen et cette expérience est incomparable.

Yann Arthus-Bertrand est venu vous chercher sur un projet local, quel est le concept développé ?

La « ville du changement » est un concept soutenu par l’ADEME et une expérience unique. Il s’agit de faire d’une ville (Lons-le-Saunier, dans le Jura) un laboratoire de la transformation des villes. La transition écologique est ici portée de manière globale et transversale par tous les acteurs :  élus, citoyens, engagés, associatifs et monde de l’entreprise et cela dans une collaboration exemplaire.

Dans cette expérimentation, qui sera retransmise à l’automne à la télévision dans une série de reportages, j’ai la responsabilité d’accompagner des acteurs multiples, de co-construire en travaillant avec les citoyens et d’accélérer l’émergence d’idées et leurs concrétisations en projets.

Les indicateurs de réussite d’un tel projet sont variés et en même temps très pragmatiques : mesurer le rythme d’élaboration et le niveau de participation des citoyens, quantifier et qualifier le nombre de personnes acteurs de chaque projet, créer de l’attractivité, etc. La participation citoyenne est au cœur de la réussite et de l’appropriation des idées, concrétisées ensuite dans des projets.

Je travaille également en parallèle sur une série dédiée aux réseaux sociaux que je pourrai résumer ainsi : « le projet est local mais l’enjeu est global ».

Comment convaincre les citoyens de changer leurs habitudes ?

L’importance est l’écoute et l’enrichissement mutuel. Il faut comprendre les préoccupations et les perceptions de chaque interlocuteur dont forcément celles de l’urgence écologique. L’écoute et le dialogue permettent d’avancer l’un vers l’autre, ensemble, quels que soient les convictions et le niveau de compréhension des enjeux.

Urgences écologiques, situation internationale… Comment garder espoir dans la période actuelle ?

Le virus de l’engagement est mis a mal par le contexte actuel et le sentiment d’impuissance face aux évènements dramatiques à l’échelle mondiale. Il faut se montrer résilient face à l’actualité, il faut protéger nos modes de vie pour demain.

La situation est compliquée mais nous devons construire et poursuivre le vivre ensemble, solidairement. C’est cela que nous devons protéger, avant même le fait de devenir activiste, engagé. Chacun peut être un acteur local des relations humaines et de défense de nos modes de vie et du lien social.

Crédit photo : Marylou Mauricio-BORN IN PPM